Pentecôte 2021

SOLENNITÉ de la PENTECÔTE,

Dimanche 23 Mai 2021, Notre Dame de TRIORS.

 

La lecture du livre des Actes des apôtres décrit la face visible du mystère de ce jour (Act. 2,1-11) : les apôtres quittent le Cénacle de façon impétueuse, le Saint-Esprit lumineux les jetant tout feu tout flamme dans les rues de la Ville ; et l’expression ici n’a rien d’ironique, ils ne sont pas ivres de vin doux, mais empoignés par le Bon Dieu (Act. 2,13 & 15). Avec l’évangile qui vient d’être chanté, c’est, plus profondément, la face cachée du même mystère, il décrit leur âme prise en Main divine. Par cette emprise sur les apôtres, Dieu envahit son Église, et ce tout feu tout flamme devient la nouvelle donne de l’Histoire humaine, contre vents et marées désormais. Cette page de S. Jean forme la seconde moitié du chapitre XIV, juste avant la délicieuse allégorie de la vigne, le cep étant uni aux sarments, image parlante du Seigneur infusant sa vie à ses disciples (Jn. 15).

Mais vous l’avez bien entendu : le début du passage de ce matin use d’une formule plus compromettante encore que le cep uni aux sarments. Aimer Jésus, pour un chrétien c’est faire sa volonté, et alors, en retour, son Père l’aime ipso facto et ils font en lui leur demeure, mansionem apud eum faciemus (14,23). Faciemus, ce pluriel fait solennellement écho au récit de la création de l’homme en contraste avec le contexte de la Genèse : Dieu dit et cela se fait ; puis : Faisons l’homme à notre image et ressemblance (Gen. 1,1ss & 1,26). De même lors de la scène du chêne de Mambré, Abraham a une visite singulière dont la portée est si forte qu’elle impose également un pluriel : il vit un ange, mais adora en ce messager les trois qui le mandataient, venus annoncer la venue du Sauveur par sa propre postérité inespérée, car rien n’est impossible à Dieu (Gen. 18 & 19,1s ; Cf. Luc 1,37). Et maintenant, Jésus est au milieu de nous, et par Lui, c’est la Très Sainte Trinité qui s’invite en chacun de nous, souhaitant sérieusement s’arrêter, souper avec nous et faire en nous sa demeure (Jn. 14,23 et Ap. 3,20).

Trop souvent, l’homme ne sait pas ouvrir sa porte quand Dieu s’invite ainsi chez lui ; il ne le reçoit que les yeux mi-clos, se contentant par légèreté de ce qu’aperçoit son regard myope et à court terme. Mais le regard intérieur rétrécit alors l’ambition divine à son égard. On pense suffisant et honnête de faire un peu la volonté divine sur ceci ou sur cela, mais ce n’est pas le don intégral de l’existence ; et puis ensuite, on est fier de soi à trop bon compte, tout en maugréant de tout et de rien : vanité des vanités, tout est vanité (Qo. 1,14, passim). Aussi nous faut-il absolument le divin Paraclet : il intervient en nous tout comme le feu qui jeta les disciples hors du Cénacle pour conquérir l’univers entier. Il leur donna d’accepter de quitter leur petit confort. L’évangile le leur avait promis pour les enseigner et leur rappeler tout ce que Jésus leur avait déjà dit (Jn. 14,26). La vie parfaite a parfaitement triomphé chez eux, le Seigneur veut faire de même en chacun de nous.

La perfection en effet, c’est Dieu en nous, c’est-à-dire notre union à Dieu, c’est-à-dire la charité parfaite qui est la grâce victorieuse en nous, sans alliage d’aucune sorte. Et le Seigneur promet alors sa paix, paix qui évacue toute inquiétude (Jn. 14,27). Nos jours sont caractérisés au contraire par l’impuissance à obtenir la paix où que ce soit : je pense à Jérusalem et au Liban, tristes symboles d’efforts si nécessaires et pourtant stériles, il y a aussi cette pandémie qui tourne en boucle et fait tourner en bourrique. La paix est-elle alors le mythe de Sisyphe : effort colossal au résultat dérisoire, éphémère, inutile, laissant l’homme irrémédiablement désabusé ?

Non pas, car voilà les rues de Jérusalem tout à coup égayées par le message de apôtres. Le pessimisme cruel rend l’homme blasé, ce n’est pas une loi inéluctable. Le dernier mot est dû au Seigneur et non pas au Prince de ce monde dont le triomphe évoqué à la fin de l’évangile n’est qu’apparent, mensonger et illusoire (Cf. Jn 14,30s) . La sortie du Cénacle fait perdre son caractère désespérant au thème de Sisyphe dû à Homère, repris par Camus et tant d’autres. Oui, Jésus donne sa Paix à ceux qui s’ouvrent en grand au Paraclet, à quiconque ouvre sa porte au Trois, comme Abraham le fit à Mambré pour souper avec eux. La société toute entière y est invitée selon le beau cri qui inaugurait le ministère de S. Jean-Paul II : Ouvrez toutes grandes les portes au Christ, à sa puissance salvatrice ouvrez les frontières des États, les systèmes économiques et politiques, les immenses domaines de la culture, de la civilisation, du développement. N’ayez pas peur ! (22 octobre 1978).

Peu de mois après Mère Teresa disait à Oslo en recevant le Prix Nobel de la Paix que le plus grand destructeur de la paix, aujourd’hui, c’est le crime commis contre l’innocent enfant à naître (10 décembre 1979). Dans Laudato Si, le pape y voit comme une offense à l’écologie primordiale : La défense de la nature, écrivait-il, n’est pas compatible avec la justification de l’avortement (Laudato Si n° 120). Mais grâce à Dieu, grâce au divin Paraclet, notre Consolateur, ce terrible obstacle peut et doit être neutralisé quand, conscients d’avoir été bernés par les illusions que fait miroiter notre style de vie, tous ceux qui sont impliqués dans le drame peuvent et doivent le regretter dans une humble confession qui redonne la paix.

Mais tant que les officiels de notre pays et de notre continent ridiculiseront nos origines chrétiennes, le Paraclet restera absent, et la paix est sera toujours impossible. Tant que la tricherie sera tolérée, sinon encouragée, la chose publique restera sous la coupe du Prince du mensonge. Disons plus : tant que l’impiété s’affiche en ses versions législatives ou en flattant la dégradation morale, les réfugiés mépriseront notre style de vie néo-barbare, contre nature et qui de plus fanfaronne. Mais comment s’étonner alors de leurs réactions brutales, s’ils sont ainsi scandalisés : Qui sème le vent récolte la tempête.

En revanche, le vent étonnant de Pentecôte dissipe ces tempêtes cruelles pour semer la paix avec la joie du Créateur retrouvant sa créature. Veni, multiplions nos appels au Saint-Esprit Consolateur, il fait triompher Jésus en nous et autour de nous, Jésus Notre-Seigneur qui se fait notre Paix. Multiplions nos Ave Maria, Notre Dame a été couverte par l’ombre divine pour concevoir Jésus, elle nous apprend à demander cette emprise divine, nous aidant à y demeurer docilement fidèles et joyeux, amen.

Ascension 2021

ASCENSION du SEIGNEUR,

Jeudi 13 Mai 2021, Notre Dame de TRIORS.

 

Il y a juste quarante jours, le cierge pascal était installé solennellement dans l’église ; c’était la nuit de Pâques. Il vient d’être éteint après le chant de l’évangile proclamé par le diacre. Dans l’Exultet, il était comparé alors à la colonne lumineuse qui guida le peuple hébreu durant les quarante ans de sa marche au désert ; il nous a guidé nous aussi tout au long de ces quarante jours. Désormais, le voilà éteint, et ce geste introduit au mystère de ce jour, enchâssé en celui de Pâques, mystère d’absence soumis à un plus grand mystère, celui de la présence divine à nos côtés. Car la colonne de feu, c’est désormais notre foi qui nous éclaire plus que jamais.

Deux versets tirés du psautier donnent à S. Augustin l’occasion de pénétrer ce nouveau et profond mystère ; il le fait à sa grande façon, dépassant la nostalgie de voir tourner irrémédiablement la roue du cycle liturgique (S. Augustin, Serm. CCLXII). Il cite tout d’abord le psaume XVIIIème qui nous fait parvenir la rumeur du ciel accueillant le Seigneur : Ce n’est pas un langage, ce ne sont pas des paroles, dont la voix soit inaudible. En effet, le son en rejaillit sur la terre toute entière, ses accents vont jusqu’au bout du monde (Ps 8,4s). Puissions-nous entendre cette belle rumeur de joie angélique à l’honneur de notre nature humaine, fière d’atteindre un tel sommet en Notre-Seigneur, Dieu qui s’est fait l’un des nôtres.

Puis, selon le saint docteur, le psaume XLVIème fait chorus avec cette symphonie : Élevez-vous, ô Dieu, au-dessus des cieux, Et que votre gloire couvre en même temps toute la terre (Ps 56,12). Ce verset, lui aussi, ne peut s’appliquer qu’à Jésus en ce jour d’Ascension : Il est en effet la seule personne divine qui soit descendue et qui conséquemment puisse s’élever pour remonter au sein de son Père, in sinu Patris. Et en même temps sa gloire couvre toute la terre, et S. Augustin voit en cela son Église catholique, c’est-à-dire répandue dans tout l’univers. L’Église devrait se définir ainsi comme le lieu de la joie glorieuse, joie spécifique de l’Ascension avec toutes ses conséquences. Mais dès lors, lui appartenir implique une vie morale sans cesse vraiment renouvelée.

En effet, la liberté de suivre dès ici-bas le Seigneur dans sa gloire requiert un combat spirituel bien avisé, afin de se dégager de ce qui entrave cette vie céleste à laquelle nous sommes appelés, et qui veut se frayer son chemin en nous. Lors de chaque messe, le prêtre encourage les fidèles à élever leur cœur, sursum corda : c’est une belle parole, mais une parole compromettante. L’heureuse collecte de la semaine passée l’a dit à sa façon, nous répétant de fixer nos cœurs là où sont les vraies joies, pour garder le cap inter mundanas varietates, parmi les vicissitudes du quotidien : ibi sint fixa corda ubi vera sunt gaudia (Col. IV° Dim après Pâques).

Au fond, le vrai débat de l’existence est affaire de cœur, d’ardeur et de pureté, alors que l’ambiance actuelle fait vivre dans une solitude glaciale, malsaine et égoïste. Sans vouloir accabler davantage notre société, pour l’heure en désarroi avec les nouveaux risques sanitaires, il faut remarquer qu’elle se contente trop souvent de faire de nous des enfants gâtés, gavés de choses vaines et inutiles, avant de dénoncer comme des chichis lorsque l’avenir n’est plus maîtrisé. Vraiment la dignité humaine vaut mieux que ces petits plaisirs ambigüs, à ras d’une terre bourbeuse, qu’on impose à notre jeunesse. Sursum corda pourrait être alors la devise la mieux avisée pour notre temps.

Expliquant le mystère de ce jour, Dom Guéranger écrit avec ferveur : Tout ce qui nous rapproche de Jésus nous est bon ; tout ce qui nous en éloigne est mauvais et funeste. Le mystère de l’Ascension est le dernier éclair que Dieu fait luire à nos regards pour nous montrer la voie. Si notre cœur aspire à retrouver Jésus, c’est qu’il vit de la vraie vie ; mais s’il est concentré dans les choses créées, en sorte qu’il ne ressente plus l’attraction du céleste aimant qui est Jésus, c’est qu’il serait mort. L’apôtre Jude dans sa petite épître dénonçait déjà l’impiété qui travestit en débauche la grâce de notre Dieu et la renie (v. 4). Ne croyons pas que l’impiété soit une nouveauté, la version qui se déroule sous nos yeux, impressionne par son caractère universel en apparence, ‘mondialiste’ dit-on maintenant. Elle s’oppose au rayonnement catholique de la pensée divine par l’Église comme le soulignait S. Augustin (Serm. CCLXII), mais c’était le cas déjà au temps des apôtres, en celui de S. Augustin, comme aujourd’hui.

Dom Guéranger poursuivait : Levons donc les yeux comme les disciples, et suivons en désir celui qui monte aujourd’hui et qui va nous préparer une place. En haut les cœurs !… Puis, il évoque la puissance rétroactive du cierge pascal pour attiser la piété : Sois donc béni, ô Cierge de la Pâque, colonne lumineuse, qui nous as réjouis quarante jours par ta flamme joyeuse et brillante. Tu nous parlais de Jésus, notre flambeau dans la nuit de ce monde; maintenant ta lumière éteinte nous avertit qu’ici-bas on ne voit plus Jésus, et que pour le voir désormais, il faut s’élever au ciel. Symbole chéri que la main maternelle de la sainte Église avait créé pour parler à nos cœurs en attirant nos regards, nous te faisons nos adieux ; mais nous conservons le souvenir des saintes émotions que ta vue nous fit ressentir dans tout le cours de cet heureux Temps pascal que tu fus chargé de nous annoncer.

Le cierge pascal échappe en ce jour à notre regard comme l’humanité de Jésus échappa naguère à celui des apôtres ; mais glorifiée in sinu Patris, elle les a confiés alors à sa Mère, celle qui avait déjà été son ciel neuf mois durant, in sinu Matris, comme un noviciat, un coup d’essai de la fête d’aujourd’hui. Le cierge pascal échappe à notre regard pour que celui de notre foi se fixe davantage in sinu Verbi. La foi dans le mystère de ce jour nous fait en effet anticiper l’habitation dans les régions célestes, ose dire la prière de ce jour, in caelestibus habitemus. Oui, la foi est un toucher, la foi est une présence qui nous a donné en Marie le Magnificat. Un instant, elle-même a ouvert visiblement les cieux à Fatima un 13 mai ; l’Église se veut toujours désormais avec elle, in sinu Verbi, amen.

Dimanche de Pâques, 4 avril 2021

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Solennité de la Résurrection du Seigneur,

Notre Dame de TRIORS, dimanche de Pâques, 4 avril 2021.

 

Les saintes femmes sont à l’honneur au petit matin de Pâques ; mais selon le récit qui vient d’être chanté, il s’agissait d’assurer au Seigneur Jésus une sépulture qui soit digne, souci purement funèbre (Mc. 16,1-7). Non sans étonnement, en tâtonnant, elles changèrent leur regard en voyant déplacée la grosse pierre du tombeau, avant d’écouter étonnées le message de l’ange. Celui-ci les dirigea vers les hommes, à savoir Pierre et les disciples. La démarche pascale des apôtres ne fut pas plus aisée, ni plus rapide ; c’est elle pourtant qui fonde la foi de l’Église. La forme extraordinaire du missel nous a donné cette version qui souligne la primauté des femmes à Pâques. En revanche, la forme ordinaire insiste plus directement sur le rôle des apôtres : alerté par Madeleine, accompagné de Jean, Pierre court vers le Sépulcre et s’ouvre à la foi pascale (Jn. 20,1-9).

Ce rôle primordial des saintes femmes fait penser d’abord à Notre Dame, à la fois en retrait et au cœur du mystère. Comme on l’a bien écrit, Marie est cachée à nos yeux dans la contemplation, tant de la sainte Cène le féminin est caché lors de l’Eucharistie, que, par la suite, à la Croix et le Samedi saint : lorsque la divinité se cache, la foi de l’Église se réfugie dans le cœur de Marie, selon la formule du Cardinal Journet. La foi, portée par le féminin, prend toute sa signification quand la divinité de Jésus s’éclipse ; et aujourd’hui dans un monde où le sens de Dieu se perd, la foi de la femme, dans sa pureté et sa proximité avec Jésus, est plus que jamais nécessaire (Gabrielle Vialla, Recevoir le féminin). Oui, les femmes dans la piété continuent de mettre les apôtres sur le chemin de Pâque.

Le rôle respectif des femmes et des hommes est ici d’une beauté divine particulière, et ceci est trop peu remarqué dans l’Église, comme le pape aime le souligner. La diversité homme-femme est souvent perçue plus ou moins comme un affrontement : cela indique probablement que Jésus et Marie sont trop peu connus et pas assez aimés, eux par qui nous sommes libérés de l’héritage ambigü et piégé d’Adam et Ève. Hélas, l’actualité, c’est une humanité devenue un piège à elle-même, piétinant l’appel instinctif à l’unité que chacun porte profondément en soi, appel associé au désir du bonheur, sûr que la création, issue du Bon Dieu, est vraiment bonne. L’humanité languissante attend Pâque.

L’évangile de ce jour rénove donc notre regard. Bien sûr, la difficulté de vivre est de tous les temps : les tensions mal résorbées entre hommes et femmes ont diverses versions, l’antique, la médiévale ou les plus récentes. Néanmoins, la mort de Jean-Paul II au soir du samedi in albis en 2005, en mondiovision, fut sous cet angle comme un beau tournant, avivant la vie pascale de l’Église : cette mort associait en effet le pape à la mission de Ste Faustine Kowalska qu’il avait lui-même authentifiée : Pierre, en lui, fut alerté par cette sainte femme qu’il canonisa. Pour la plupart, vous vous souvenez de ce grand moment qui galvanise notre vie pascale. Mettons-nous à l’école de Faustine pour bien pénétrer le mystère pascal qui est celui de la miséricorde trop méconnue.

Son Petit Journal est une mosaïque de conversations qu’elle eut avec le Seigneur, prolongeant de quelque manière le dialogue des saintes femmes à la première Pâque. Voici son récit de la Résurrection : Aujourd’hui, pendant la célébration, je vis Jésus dans une grande clarté. Il s’approcha de moi et dit : Que la paix soit avec vous, mes enfants. Il leva la main et nous bénit. Les plaies de Ses Mains, de Ses Pieds et de Son Côté n’étaient pas effacées, mais lumineuses. Par la suite, tout le temps pascal me sembla durer une minute à peine. Un singulier recueillement envahit mon âme, y demeurant pendant toute la durée des fêtes (PJ 340).

À une autre occasion (PJ 1043ss), elle se vit simultanément, dans la Chapelle du Saint Père, et en même temps dans la sienne, car la solennité y était étroitement liée à celle de Rome. Dans sa Chapelle, Notre-Seigneur Jésus était exposé dans l’ostensoir sur le Maître-Autel, paré comme pour les grandes occasions et la même cérémonie avait lieu à Rome dans un beau sanctuaire ; le Saint Père, en compagnie de tout le clergé y célébrait. Tout à coup, poursuit-elle, j’aperçus Saint Pierre ; ce qu’il a dit, je n’ai pu l’entendre, mais je sais que le Saint Père comprenait son langage. Sur ce, quelques ecclésiastiques que je ne connaissais pas, commencèrent à m’examiner et m’humilier, ou plutôt à critiquer. Cependant je vis Jésus Lui-même prendre ma défense et leur donner à comprendre ce qu’ils ne savaient pas sur la miséricorde spécialement liée au Temps pascal.

Étonnée de cette mission face au clergé réticent, elle entendit le Seigneur lui répondre à une autre occasion (PJ 340) : Qui sait quelque chose de la miséricorde ? Personne ! Ceux qui ont à la publier et à enseigner les gens en leur en parlant, souvent, ne le savent pas eux-mêmes. C’est pourquoi, Je désire que mon image soit solennellement bénie, le premier dimanche après Pâques, et qu’elle reçoive les honneurs publics, afin que chaque âme en soit informée. Fais une neuvaine à l’intention du Saint-Père ; celle-ci doit se composer de 33 actes, c’est-à-dire que tu répéteras 33 fois cette petite prière à la Miséricorde que Je t’ai apprise.

Pour nous autres, Pâque est un peu en veilleuse sanitaire comme l’an dernier. Mais nous ne sommes pas démunis : en réintroduisant l’eau bénite pour les fidèles par bec verseur, nous voulons affirmer humblement que l’esprit de foi dut avoir le dernier mot, témoignant d’une prudence qui va au-delà de celle des responsables, laquelle est pourtant si nécessaire malgré leur désarroi du moment. Lors du Grand Vendredi et dans l’Exultet de cette nuit, nous avons prié pour nos gouvernants avec solennité, les gardant maintenant dans la prière de l’alleluia pascal, lequel ne peut être confiné : oui, l’alleluia est intrinsèquement inconfinable. Te decet laus, la joie déborde de nos âmes sur nos lèvres, et cette joie est la grande urgence pour sauver le triste monde. Regina caeli laetare, alleluia. Amen.

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Jeudi Saint 1er avril 2021

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Solennité de la Cène du Seigneur,

Notre Dame de TRIORS, Jeudi Saint 1er avril 2021.

 

 

Le collège apostolique est dans la chambre haute du Cénacle pour entendre les ultimes confidences du Seigneur. Selon la tradition, le Cénacle deviendra dans les jours à le lieu des hauts-faits divins : le soir de Pâques d’abord, le Ressuscité y retrouvera les apôtres, leur montrant ses plaies et leur donnant pouvoir de pardonner les péchés. Puis, après l’Ascension, ils y attendront avec ferveur les langues de feu de la Pentecôte. Les apôtres, assez désemparés en ce premier soir, diront alors à pleins poumons les magnalia Dei, ses merveilles. L’évangile nous introduit en cet enchaînement de grâces, avec une solennité que souligne le lavement des pieds (Jn. 13,1-15).

Ces merveilles de notre salut ont été transcrites et mises en ordre par le Doigt de Dieu : tout se tient dans l’Écriture divinement révélée. Avec l’Heure de Jésus qui arrive, l’ensemble prend sa cohérence : les pèlerins d’Émmaüs vont découvrir celle-ci avec un cœur tout brûlant, les Onze également, et Saul aussi un peu plus tard aux portes de Damas. Quant à Notre Dame, les confidences n’ont pas du manquer depuis Cana pour préparer cette Heure-ci. On dirait un puzzle dont les pièces détachées un temps, leur donnent maintenant toutes ensembles le message global : Le Seigneur nous a laissé le souvenir vivant de ses merveilles – Memoriam fecit mirabilium suorum (Ps. 111,4).

Avant que les confidences du Seigneur orientent vers ces magnalia Dei, au grand étonnement des disciples perplexes et un peu inquiets, il commence donc par leur laver les pieds. Avec sa perspicacité inspirée, Origène rapproche avec bonheur cet épisode et d’autres parties de l’Écriture. Le salut de Dieu, dit en effet un psaume, nous vient comme une pluie sur la toison, comme une bruine dégoulinant sur la terre – sicut pluvia in vellus, stillicidia stillantia super terram (Ps. 71,6). Par ailleurs pour lui, Gédéon recueillant l’eau de la toison du l’aire de la moisson voyait à l’avance ce qui allait arriver. La rosée y tomba si largement, dit le texte sacré que la toison pressée dans un bassin l’a rempli d’eau (Jug. 6,36-38). Tu le vois, conclut Origène : Les prophètes entrevoyaient ce qui devait être accompli aux derniers temps par le Seigneur : cette eau que Jésus versait dans un bassin, c’était la rosée de la grâce céleste dont il lavait les pieds de ses disciples (Hom. sur les Juges, VIII,5. SC 389 p.201).

Memoriam fecit mirabilium suorum – Oui vraiment, le Seigneur nous a laissé ses merveilles comme en souvenir vivant ; Il est miséricorde et compassion à notre égard, poursuit le psaume, misericors et miserator Dominus (Ps. 111,4). Dieu miséricordieux dévoile au Cénacle ces merveilles, mirabilia, avant que, bien pris en main par le Saint-Esprit, les apôtres les publient dans les rues de Jérusalem à la Pentecôte. Selon S. Robert Bellarmin, il s’agit ici de l’unique et grande Œuvre de sa miséricorde telle que la rapportent par exemple le psaume et Gédéon. La manne en fut surtout la figure, signe du sacrement à venir de l’Eucharistie donné au peuple chrétien en nourriture spirituelle et en mémoire des prodiges que Jésus-Christ opéra sur la terre, prodige dont le plus éclatant est sa glorieuse passion par laquelle le Sauveur, en mourant, détruisit pour nous le mal de la mort, et triomphe du prince de ce monde.

À la suite des apôtres, les prêtres de la Nouvelle Alliance doivent avoir les pieds lavés avant de témoigner de ces mirabilia Dei, trésor de la miséricorde divine. Avec la vénérable Marthe Robin il faut souligner le rôle irremplaçable du prêtre : Chacun a sa place dans l’Église, et il faut que chacun y soit à sa place ! Pas les uns sans les autres, précise-t-elle, mais toujours les uns avec les autres, et pas les uns comme les autres. Le prêtre doit montrer et donner Jésus aux âmes : il est, dit-elle encore, le continuateur du Christ. Jésus l’a choisi pour le personnifier, pour le continuer auprès des âmes, pour le faire connaître et aimer par sa parole. Aussi puissent-ils eux-mêmes garder leur regard fixé sur Jésus, orientant celui des fidèles : Regardons-le, regardons-le souvent, regardons-le longuement, regardons-le toujours ; non pour le copier dans ce qu’il a fait, mais pour lui ressembler dans ce qu’il est : doux et humble de cœur, rempli d’amour, rempli de charité, de compassion et de pardon pour tous (Journal, 3 février 1930).

La vocation sacerdotale si nécessaire à l’Église est très exigeante, surtout de nos jours. Marthe redoutait que nos prêtres soient trop délaissés : Ils manquent de prière et d’aide. Il faut prier pour eux. Certains se sont découragés, car on leur demande beaucoup, mais pensons-nous à eux ? Il leur faut des amis. Il faut qu’ils se regroupent pour la prière et pour tout. Et quand ils défaillent, plus que jamais les prêtres ont besoin d’aide : Ils devraient toujours être traités en prêtres, insistait Marthe, car ils sont prêtres pour l’éternité. Même les prêtres devenus fous devraient être traités en prêtres. Il faudrait, pour s’occuper d’eux, des religieux spécialement formés pour remplir cette fonction et qui les traiteraient avec tout le respect que l’on doit à un prêtre. L’actualité rejoint ce souhait de Marthe, incitant notre prière. Confions nos prêtres en difficulté au Seigneur Jésus pour qu’il leur lave les pieds et réchauffe leur cœur.

Le Jeudi-Saint honore le sacerdoce avant de faire goûter à tous la joie pascale, selon cette belle hymne de S. Ephrem : Ô soirée dernière du Seigneur, bienheureuse ! En toi s’achève la veillée d’Égypte : le Seigneur changea la pâque vieillie, il en fit la grande Pâque. De fête en fête, de Pâque en Pâque, les figures sont accomplies. Avec Benoît XVI confions bien à Notre-Dame le sacerdoce catholique (18 août 2009) : Que Marie rende tous les prêtres, dans tous les problèmes du monde d’aujourd’hui, conformes à l’image de son Fils Jésus, dispensateurs du trésor inestimable de son amour de bon Pasteur. Amen.

St Benoît 22 Mars 2021

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Solennité du Transitus de N. Bx Père S. Benoît,

Notre Dame de Triors, le 22 mars 2021.

Le trépas de saint Benoît a-t-il eu lieu un jour d’équinoxe de printemps ? Le modeste début de la douce saison évoque assurément, et de façon admirable, l’équilibre de sa doctrine et de sa vie avant le déploiement de toute sa richesse interne. Le vénérable Pie XII vantait en sa Règle l’admirable jumelage de vertus pourtant contrastées qui lui confère cet attrait à la fois si humble et puissant : prudence et simplicité, humilité et généreux courage, douceur tempérée de sérieux, ainsi que cette saine liberté qui ennoblit la nécessaire obéissance. Dans la Règle, poursuivait-il en s’appuyant sur le Panégyrique de Bossuet faisant son éloge, la correction conserve sa vigueur, mais l’indulgence et la bonté l’agrémentent de suavité ; les préceptes gardent toute leur fermeté, mais l’obéissance donne repos aux esprits et paix aux âmes ; le silence plaît par sa gravité, mais la conversation s’orne d’une douce grâce ; enfin l’exercice de l’autorité ne manque pas de force, mais la faiblesse ne manque pas d’y trouver un soutien (Enc. Fulgens radiatur, 21 mars 1947).

Le Prologue est à la Règle ce que le printemps est aux belles promesses d’été. Il donne le ton et suscite d’emblée le désir de conquérir cet équilibre vanté par Bossuet. Il ne s’agit pourtant que d’une simple exhortation à vivre dans la lumière, sous la conduite de l’évangile. Il est émaillé de citations scripturaires ; un verset du IVème évangile irradie plus particulièrement cette lumière de la foi divine donnant accès et faisant goûter son premier mot, ausculta. Il s’agit d’une injonction qui est faite, d’écouter le père très aimant qui invite à Le suivre. Marchez, dit donc l’évangile (Jn. 12,35), courrez, insiste S. Benoît, oui courrez pendant que vous avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous surprennent.

Dans son Commentaire, le Grand Père abbé en rapproche un passage similaire de S. Jean également : Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie (Jn. 8,12). Pour Dom Delatte, il s’agit inséparablement de la Personne de Jésus lui-même, notre lumière, et de la foi divine, lumière théologale qui fait marcher et même courir divinement (Com. p. 9). À partir de ce verset, il comparait devant les moniales la lumière qu’est le Seigneur dans notre vie intérieure, à la colonne de feu et à la nuée guidant le peuple élu dans le désert. Oui, notre vie est heureuse, insistait-il, quand elle est guidée par lui. Notre vie cachée devient même la vraie lumière du monde entier, d’autant plus que l’humilité justement la cache dans la Face de Dieu. On pourrait contester ces images à la fois prétentieuses et contradictoires : un flambeau qui marche, un flambeau qui, même, fait courir le moine selon le Prologue. L’image disparate ne déconcerte que les esprits étroitement mécaniques ; mais décidément le Seigneur est ainsi à notre égard, nous conduisant à la vraie vie, étant lui-même cette vie véritable (S. Jean aux moniales, t. II, p. 238-241).

À dire vrai, S. Augustin l’avait précédé en ce genre d’exégèse. Sur ce verset il voit le Sauveur nous faire passer des yeux du corps à ceux du cœur : Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de vie. Et on pense alors au psaume XXXV : Quoniam apud te est fons vitae – en Vous est la source de vie, aussi par Votre lumière, nous voyons la lumière. Nous verrons la lumière dans Votre lumière, insiste le saint docteur, parce qu’en Vous est la source de vie. Puis il précise : Dans les choses extérieures qui sont à l’usage du corps, la lumière est distincte de sa source : une gorge desséchée cherche la source, l’œil demande la lumière ; mais en Dieu, la lumière est la même chose que la source, Dieu est tout à la fois la lumière qui brille pour éclairer, et la source qui coule pour étancher la soif.

C’est en 1947 que Pie XII rédigea son encyclique en l’honneur de S. Benoît ; c’était donc au lendemain de la guerre ; le Mont Cassin n’était qu’un monceau de ruines fumantes, avec un tout petit monastère rescapé à côté. Il invitait pourtant la société à regarder vers N. Bx Père avec une studieuse et diligente attention, ainsi que ses enseignements et ses hauts faits. On ne saurait échapper alors à l’attrait de son esprit et à la force de son influence. Notre siècle, disait-il alors, rempli et désaxé lui aussi par tant de graves ruines matérielles et morales, par tant de dangers et de désastres, peut (et même doit) lui demander des remèdes nécessaires et opportuns. Le vénérable Pape invitait à conclure doucement et dans l’intime de la conscience que les principes sacrés de la religion et les normes de vie qu’elle édicte sont les seuls fondements, les plus solides et les plus stables de l’humaine société. Une fois renversés ou affaiblis, il s’ensuit presque fatalement que tout ce qui est ordre, paix, prospérité des peuples et des nations se détruit progressivement. Nous en avons la preuve sous nos yeux, des ruines fumantes.

La grande culture de Pie XII associait cette apaisante recommandation à l’évangile adapté par notre Règle, avec la sagesse antique qui voyait dans la piété et la religion la sauvegarde de l’ordre social : Vous autres, Pontifes, écrivait Cicéron, pour protéger la ville, vous l’encerclez plus efficacement par la religion que ne le font les murailles elles-mêmes (de natura deorum, II c. 40). La Cité de Dieu d’Augustin et la Règle bénédictine ont fait sortir la société de l’hiver barbare pour l’introduire peu à peu dans le printemps social qu’appelait de ses vœux le célèbre sage païen. Pourtant régulièrement des hérésies tenaces prêchent un ciel sur terre sans la croix, sans Dieu sinon l’homme lui-même, ou plutôt une idéologie-prophète d’une nouvelle religion sans Jésus et sans Dieu, confiée à un Führer ou à une poignée de technocrates. Pie XII dénonçait cela avec le même Cicéron : Une fois disparues la sainteté et la religion, suit le désordre de l’existence, avec une grande confusion ; et je ne sais si, la piété une fois supprimée, ne disparaîtront pas également la confiance et la bonne entente entre les mortels, ainsi que la plus excellente de toutes les vertus, la justice (op.cit., I c. 2).

La Règle vécue simplement ne cherche que la joie venue du ciel, largement répandue dans une société paisible enracinée dans l’évangile. Les Totila de tous les temps n’y peuvent rien, car elle fédère l’immense cortège des âmes humbles et fidèles disséminées comme un ferment et rayonnant la joie de Dieu par sa sainte Mère, amen.

St Joseph 2021

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Solennité de Saint Joseph, 19 mars 2021

Notre Dame de Triors.

 

De qui le Messie doit-il être le fils ? À la question du Seigneur, les pharisiens répondirent : De David (Mt. 22,42). De fait l’évangile répète souvent cette façon de s’adresser à lui : Jésus, fils de David ! D’ailleurs, la généalogie du Seigneur, en S. Luc ou S. Mathieu, souligne la filiation à partir de David, mais l’une et l’autre par S. Joseph, comme on le chante à la fin des Matines de Noël : Jacob autem genuit Joseph, virum Mariæ, de qua natus est Jesus, qui vocatur Christus (Mt. 1,17). S. Luc souligne de même, Joseph de domo David (Lc. 1,27). Chaque mot est ici à sa place, exactement pesé.

Non sans audace, S. Augustin commente ainsi l’exactitude de ces mots si précis : Ne craignons pas de tracer la généalogie de Jésus par la ligne qui aboutit à Joseph, car de même qu’il est époux-vierge, ainsi est-il père-vierge. Ne craignons pas de placer le mari avant l’épouse, car c’est l’ordre de la nature et de la loi de Dieu. Si nous venions à écarter Joseph pour faire mention seulement de Marie, il nous dirait avec raison : pourquoi me séparez-vous de mon épouse ? Pourquoi ne voulez-vous pas que la généalogie de Jésus aboutisse à moi ? Nous lui dirions : parce que vous n’avez pas engendré par l’œuvre de la chair ? Il nous répondrait : et Marie, a-t-elle engendré par l’œuvre de la chair ? Ce que le Saint Esprit a opéré en elle, il l’a opéré pour tous les deux (cité en 30 visites à Joseph le silencieux, Père Michel Gasnier, p. 25).

Ce ne sont pas tant les mains calleuses de Joseph qui enracinent notre dévotion à son égard, mais bien plutôt cette lignée royale, qui indique d’ailleurs celle de Marie son épouse : l’un et l’autre dit ainsi, bien humblement pourtant, la noblesse transcendante de l’Incarnation rédemptrice qui a pris toute leur vie, en choisissant ce qui est le plus relevé, tout en s’y cachant. Malgré tout cela, ce que la liturgie avec l’évangile qui vient d’être chanté retient de Joseph, tient à ce seul mot : Justus (Mt. 1,19). Il sut en effet ajuster sa vie aux circonstances absolument inédites qui l’attendaient dès le début, protégeant l’honneur de Marie et les peines qui entourèrent le premier Noël, fuite en Égypte comprise.

La liturgie, elle aussi, chante Joseph comme le Juste envers et contre tout, pour honorer à la perfection la fidélité de Dieu venant à nous par lui. Bossuet pour parler de lui trouve trois dépôts à lui confiés par la Providence divine, et par là trois vertus remarquables qui répondent à ces trois dépôts. Cela formait le plan de son Panégyrique en 1659. Il s’agit d’abord de la Sainte Virginité de Marie : pour la protéger sous le voile du mariage, Joseph fut doté de la pureté angélique, afin de répondre à la pureté de sa chaste épouse, l’Immaculée. Il s’agit ensuite de la personne même de Jésus-Christ que le Père céleste dépose en ses mains, pour lui servir de père : la vertu nécessaire, c’est ici une fidélité inviolable et inébranlable quoi qu’il arrive. Enfin, il garde le secret admirable de l’Incarnation du Fils de Dieu : il ne fallait pas montrer Jésus-Christ au monde avant l’heure ; la vertu qui accompagne ce dépôt-ci, c’est l’humilité, pour conforter la prudence dont il eut besoin à un degré éminent.

Pour de multiples raisons d’ordre théologique et historique, la dévotion à l’époux de Marie a mis du temps avant de se développer. Elle est désormais bien établie et doit encore se développer. Léon XIII la mit à l’honneur en 1889, et cent ans après, S. Jean-Paul II salua son initiative en l’honneur du saint (Quamquam pluries, 15 août 1889 ; Redemptoris Custos, 15 août 1989). Le saint Père actuel a été intronisé le jour de la saint Joseph, le 19 mars 2013, et lui consacra le Vatican avec tous ses problèmes trois mois plus tard (5 juillet 2013) ; il décida en outre que le nom de S. Joseph figurerait dans chacune des prières eucharistiques, et il a décidé enfin de lui dédier cette année-ci. L’Église et le monde ont grand besoin de revenir à Joseph, de le contempler, de s’inspirer de lui. De plus, notre famille monastique voit comme une marque de sa bienveillance sur nous le fait que Dom Édouard Roux et Mère Cécile Bruyère aient été rappelés à Dieu le jour de sa fête.

Le premier, Dom Roux, vantait chez Joseph, la pureté du cœur, sa docilité surnaturelle, le silence dans lequel il demeure enveloppé, et à ce titre, il y voyait l’exemplaire achevé de l’idéal contemplatif (Cf. Marie Mère et Reine, p. 11). De son côté, Mère Cécile fait admirer chez lui l’insondable respect du secret divin, sacramentum Regis (Tob. 12,7) : Le Seigneur commence toujours dans le secret. Voyez le Mystère de l’Incarnation : pendant plusieurs mois, il fut le secret de Notre Dame seule; puis saint Joseph le connut à son tour (c’est l’évangile de ce jour). Et avec une fine ironie, elle poursuit : Le diable n’agit pas ainsi lui ; il fait ses œuvres au son des cymbales et des trombones, comme les bateleurs. Comme ce qu’il fait ne durera pas, il faut qu’il se dépêche. Mais quand il s’agit des âmes, Dieu commence aussi par opérer secrètement. Puissent les moines bien entrer dans les secrets desseins de Dieu : toute vie spirituelle sérieuse est marquée de ce sceau qui caractérise S. Joseph comme aussi l’Immaculée. Amen.

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