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Cène du Seigneur
Jeudi Saint 28 mars 2024
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, amen.
Mes bien chers frères et sœurs,
Mes très chers fils,
Dans la lecture de sa première Épître aux Corinthiens, saint Paul nous a donné à contempler le Seigneur qui institue l’Eucharistie en la réalisant sous les yeux des apôtres. Et Jésus leur a ordonné de perpétuer ce geste. « Faites cela en mémoire de moi », dit-il par deux fois : après avoir changé le pain en son Corps et après avoir changé le vin en son Sang. Ainsi, il a aussi institué le sacerdoce de la Nouvelle Alliance, le sacerdoce chrétien.
Les prêtres sont dès lors le prolongement du Christ. Il a offert sur la Croix l’unique sacrifice rédempteur, et les prêtres renouvellent sur l’autel ce sacrifice et nous mettent au contact de la Croix qui nous sauve. Quelle bonté, quelle délicatesse du Seigneur ! Quelle haute et belle mission pour le prêtre !
Mais aujourd’hui, quelques personnes estiment de bon ton de critiquer et d’humilier les prêtres. On prend occasion de comportements vraiment indignes de certains d’entre eux pour envelopper l’ensemble dans une accusation générale. Le prêtre serait a priori un orgueilleux et un profiteur. Nous savons combien cette incrimination est douloureuse et blessante pour le plus grand nombre des prêtres qui vivent dans une abnégation complète et joyeuse, au service des âmes. Alors ce soir, revenons à la vérité et méditons quelques instants sur le don merveilleux que Dieu a fait à l’humanité en lui donnant les prêtres catholiques.
Ces hommes ont donné leur vie pour laisser place au Seigneur. Le sacrement de l’ordre a fait du prêtre un autre Christ. Par le prêtre, Jésus se rend visiblement présent dans notre vie de tous les jours.
Au fond, c’est donc normal qu’un prêtre soit en butte au mépris, aux moqueries, aux railleries, au persiflage, et parfois à la persécution sanglante. Lui qui renouvelle à l’autel le sacrifice du Christ, il renouvelle aussi dans sa vie la montée au Calvaire du Seigneur. Jésus a reçu des gifles, il a été sali de crachats, il est mort : c’est le programme pour tout prêtre, aujourd’hui comme à toutes les époques.
Mais nous, catholiques, savons-nous reconnaître dans nos prêtres, tout infirmes qu’ils soient, le Seigneur qui continue de porter sa Croix ? qui continue de se livrer pour que le saint Peuple de Dieu ait la vie en abondance ?
Par la célébration de la Messe, et l’administration des sacrements, le prêtre sert de canal pour la grâce qui nous vient du Calvaire. Il est l’instrument de l’unique sacerdoce du Christ. Le Catéchisme enseigne que :
Le sacrifice rédempteur du Christ est unique, accompli une fois pour toutes. Et pourtant, il est rendu présent dans le sacrifice eucharistique de l’Église. Il en est de même de l’unique sacerdoce du Christ : il est rendu présent par le sacerdoce ministériel [des prêtres] sans que soit diminuée l’unicité du sacerdoce du Christ : » Aussi le Christ est-Il le seul vrai prêtre, les autres n’étant que ses ministres « 1.
Leur rôle est de répercuter, à chaque instant de l’histoire, l’immense acte du Christ sur la Croix. C’est pourquoi le Code de Droit Canon demande :
Que les prêtres célèbrent fréquemment, ayant toujours présent à l’esprit le fait que l’œuvre de la Rédemption se réalise continuellement dans le mystère du Sacrifice eucharistique ; bien plus, leur est vivement recommandée la célébration quotidienne qui est vraiment, même s’il ne peut y avoir la présence de fidèles, action du Christ et de l’Église, dans la réalisation de laquelle les prêtres accomplissent leur principale fonction2.
Les prêtres, outre la Messe et les sacrements, offrent sans cesse à Dieu, au nom de toute l’Église, la prière liturgique, en la chantant en chœur, ou en la lisant dans leur bréviaire, et ils s’adonnent à l’oraison personnelle pour le salut de tous.
Tenons-nous donc loin d’une idéologie égalitariste, reconnaissons la complémentarité des missions dans l’Église, et donc leurs différences. Si ce soir nous nous réjouissons du sacerdoce, ce n’est pas au détriment de ceux qui n’en sont pas revêtus. Le sacerdoce ministériel est justement à leur service, c’est un ministère, ministerium, un service. Les hommes et les femmes baptisés sont quant à revêtus de la dignité d’un sacerdoce royal. Ils sont appelés à offrir à Dieu la louange qu’il attend de la création. La Constitution dogmatique conciliaire sur l’Église, Lumen Gentium, enseigne :
Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, qui ont entre eux une différence essentielle et non seulement de degré, sont cependant ordonnés l’un à l’autre : l’un et l’autre, en effet, chacun selon son mode propre, participent de l’unique sacerdoce du Christ. Celui qui a reçu le sacerdoce ministériel jouit d’un pouvoir sacré pour former et conduire le peuple sacerdotal, pour faire, dans le rôle du Christ, le sacrifice eucharistique et l’offrir à Dieu au nom du peuple tout entier ; les fidèles eux, de par le sacerdoce royal qui est le leur, concourent à l’offrande de l’Eucharistie et exercent leur sacerdoce par la réception des sacrements, la prière et l’action de grâces, le témoignage d’une vie sainte, leur renoncement et leur charité effective3.
La dimension pétrinienne de l’Église est au service de la dimension mariale. Il y a donc un service mutuel entre les deux sacerdoces, et il fera notre émerveillement au Ciel.
Remercions Dieu et demandons-lui de donner sa grâce en abondance pour faire naître de nombreuses vocations. Il y a quelques jours, le Saint Père a donné son message pour la journée de prière pour les vocations.
[Je vous exhorte, dit-il, à] la prière pour invoquer du Père le don de saintes vocations pour l’édification de son Royaume : « Priez donc le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson ». Et la prière – nous le savons – est faite plus d’écoute que de paroles adressées à Dieu. Le Seigneur parle à notre cœur et veut le trouver ouvert, sincère et généreux. Sa Parole s’est faite chair en Jésus-Christ, qui nous révèle et qui nous communique toute la volonté du Père4.
Dans les familles, que l’on favorise donc les vocations en apprenant aux enfants, dès l’enfance, à être attentifs à l’appel du Seigneur. Il faut garder son cœur pur et disponible, il faut que les parents disent à leurs enfants combien est belle une vie donnée au Seigneur et au service des frères et sœurs dans l’Église.
Ce soir, dans la célébration de la sainte Cène, à laquelle la discrète Vierge Marie a participé très activement par sa prière, remercions notre Dieu, d’un cœur vibrant, pour le don qu’il nous a fait du sacerdoce ministériel. Prêtres, frères et laïcs, remercions-le avec grande gratitude.
Amen.
1CEC 1545, citant saint Thomas d’Aquin, Hebr. 7, 4.
2CIC 904.
3Concile Vatican ii, Lumen gentium, n. 10.
4Pape François, 19 mars 2024, pour la journée du 21 avril 2024.