+

Solennité de la Nativité du Seigneur
Messe du jour

Dimanche 25 Décembre 2022

 

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, amen.

Mes bien chers frères et sœurs,

Mes très chers fils,

 

Voici les décorations de Noël, voici les aimables et chaleureuses coutumes. Elles sont bonnes, elles nous signalent, elles nous indiquent quelque chose de grand. Dépassons-les donc. Rappelons-nous pourquoi tout cet apparat. C’est d’abord qu’un enfant nous est né. L’atmosphère est à la joie. Allons plus profond, car ce n’est pas une naissance comme les autres. Oui, mystère de foi, c’est la naissance du Verbe de Dieu, qui vient partager notre condition humaine, nous éclairer et nous rendre la vie éternelle !

Quelques mots de l’Évangile résonnent en effet encore à nos oreilles émerveillées : « En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ». C’est par cette grandiose présentation du Seigneur Jésus que l’apôtre saint Jean ouvre son Évangile ; saint Jean qui a vécu trois ans aux côtés du Verbe de vie. Il a contemplé par quel chemin Dieu est venu nous délivrer de la mort. « En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ».

En ce jour divin, méditons donc ces mots. Recueillons-nous et adhérons toujours plus à la vérité de cette phrase : « la vie est la lumière des hommes ». Regardons ce nourrisson qui repose dans une minable mangeoire, et redisons : « En lui est la vie ! »

Il éclaire notre regard sur la vie. Il révèle la dignité de toute vie humaine.

Déjà, pendant l’avent, nous l’avons adoré dans le sein de Marie. Nous avons imité son cousin Jean et nous avons exulté à l’approche du divin embryon. Tous ces derniers jours, au début de l’office nocturne, nous chantions : « Prope est jam Dominus, venite adoremus — Le Seigneur est désormais tout proche, venez, adorons-le » encore caché dans l’écrin virginal. Si nous l’adorons, c’est que la personne divine est déjà présente. Cela signifie aussi que tout enfant à naître est déjà une personne. Jésus n’était pas né, et déjà il nous rappelait la dignité de l’homme dès sa conception.

Oui, la valeur de la vie humaine dépasse singulièrement les aptitudes plus ou moins développées à entrer en communication avec l’entourage.

Dans un très beau texte approuvé et encouragé par le Saint Père en 2020, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a développé une réflexion qui peut nous aider en ces jours où l’on menace d’aggraver la législation contre la vie humaine, contre la vie humaine en son commencement et en son achèvement sacrés. Il s’agit de la lettre Samaritanus bonus. Elle nous rappelle comment Noël révèle la dignité de l’homme :

Dieu s’est fait Homme pour nous sauver, nous promettant le salut et nous destinant à la communion avec lui : c’est là le fondement ultime de la dignité humaine.

Mais la dimension surnaturelle n’est pas seule à garantir la valeur de la vie humaine. La sagesse naturelle reconnaît « dans la vie humaine le premier bien commun de la société », et cela est un discours que doivent pouvoir entendre nos contemporains :

L’Église affirme le sens positif de la vie humaine comme une valeur déjà perceptible par la droite raison, que la lumière de la foi confirme et valorise dans sa dignité inaliénable. Il ne s’agit pas d’un critère subjectif ou arbitraire, mais bien plutôt d’un critère fondé sur la dignité naturelle et inviolable – puisque la vie est le premier bien en tant que condition de la jouissance de tout autre bien – et sur la vocation transcendante de tout être humain, appelé à partager l’Amour trinitaire du Dieu vivant : « l’amour très particulier que le Créateur a pour chaque être humain “lui confère une dignité infinie” ». La valeur inviolable de la vie est une vérité primordiale de la loi morale naturelle et un fondement essentiel de l’ordre juridique. De même que nous ne pouvons accepter qu’un autre homme soit notre esclave, même s’il nous le demande, nous ne pouvons choisir directement de porter atteinte à la vie d’un être humain, même s’il l’exige1.

Du Verbe, saint Jean écrivait que « en lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ». Notre condition actuelle nous laisse dans un clair-obscur qui appelle une pleine lumière. Saint Bernard a écrit la valeur de cette ombre qui nous mène au grand jour :

Le Prophète le dit expressément en parlant du Christ : « Le Christ, Notre-Seigneur, est notre souffle, vivons à son ombre parmi les nations2. » Car dans la béatitude céleste, on ne vit plus à son ombre, mais dans le rayonnement de sa lumière. « Dans tout l’éclat des saints, je t’ai engendré avant l’aurore3. » Tel est le langage du Père. Mais la Mère ne l’a pas engendré dans la lumière, elle l’a conçu dans cette ombre dont l’a couverte le Très Haut4.

Réjouissons-nous d’appartenir à l’amitié d’un si grand Sauveur. Nous sommes invités à devenir amis intimes du Verbe éternel qui se fait tout petit pour que nous puissions le porter, comme Marie et Joseph. « En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ».

Amen.

 

1Suite : Par conséquent, supprimer un malade qui demande l’euthanasie ne signifie pas du tout reconnaître son autonomie et la valoriser, mais signifie au contraire méconnaître la valeur de sa liberté, fortement conditionnée par la maladie et la douleur, et la valeur de sa vie, en lui refusant toute possibilité ultérieure de relation humaine, de sens de l’existence et de croissance dans la vie théologale. De plus, on décide du moment de la mort à la place de Dieu. Pour cette raison, « l’avortement, l’euthanasie et même le suicide délibéré […] corrompent la civilisation, déshonorent ceux qui s’y livrent plus encore que ceux qui les subissent et insultent gravement à l’honneur du Créateur ».[29]

2Lm 4, 20.

3Ps 109, 3 ; antienne de communion de la Messe de minuit.

4Saint Bernard, L’Aqueduc, n. 1 et 2, éditions du Seuil, p 881-882.