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Solennité de Notre Bienheureux Père
Saint Benoît

Lundi 11 Juillet 2022

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, amen.

Mes bien chers frères et sœurs,

Mes très chers fils,

Le troisième mois après leur sortie d’Égypte, terre de toutes les angoisses, les Hébreux se trouvaient au pied du Sinaï (cf. Ex 19, 1). Le Seigneur appela Moïse du haut de la montagne et lui dit, pour qu’il le leur redise :

Tu diras à la maison de Jacob, et tu annonceras aux fils d’Israël : “Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Égypte, comment je vous ai portés comme sur les ailes d’un aigle et vous ai amenés jusqu’à moi. Maintenant donc, si vous écoutez ma voix et gardez mon alliance, vous serez mon domaine particulier parmi tous les peuples, car toute la terre m’appartient ; mais vous, vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte.” Voilà ce que tu diras aux fils d’Israël (Ex 19, 3-6).

Par son alliance, le Seigneur se constitue un domaine, un royaume, une nation sainte. Et tous les hommes sont appelés à entrer dans ce domaine de consécration. Par leur baptême, ils sont plongés dans la Mort et la Résurrection du Christ, ils sont marqués de son Sang rédempteur.

Aux hommes et aux femmes de bonne volonté, le Seigneur Jésus lance une invitation plus pressante encore : celle de renoncer aux affections naturelles légitimes « pour son nom », comme nous a dit l’Évangile, et c’est la voie des conseils évangéliques par lesquels les âmes religieuses, poussées par le Saint-Esprit veulent se consacrer sans aucune réserve à la louange de la gloire de leur Père céleste.

Sur ce chemin, la Vierge Marie est première. Elle est la pleine de grâce, il n’y a aucune scorie d’affection déréglée dans l’or de son âme. Elle est la première consacrée. Et après elle, toute âme consacrée vient puiser à sa source. Toute consécration est mariale.

Notre Bienheureux Père saint Benoît a lui aussi ressenti ce besoin de s’offrir sans réserve au Dieu Tout-Puissant. S’éloignant de Rome et de ses amitiés, il a voulu ne rien mettre au-dessus de l’amour du Christ. Comment se fait-il alors que ni la Règle qu’il a rédigée pour nous guider sur ses traces, ni sa Vie ne mentionne ne serait-ce que le nom béni de la Vierge Mère ?

Il y a un cependant un passage de la Règle qui trahit la dévotion mariale de saint Benoît. On y voit qu’il louait quotidiennement avec la Vierge Marie les grandes œuvres de Dieu. Il a si profondément goûté cette proximité avec l’esprit de l’Immaculée qu’il a voulu l’instituer à jamais dans la liturgie que célébreraient les générations de ses fils les moines. Et il a écrit, dans le chapitre 17 de sa Règle qui organise les offices du jour :

La synaxe du soir comprendra quatre psaumes, avec antiennes. Après ces psaumes, on récitera une leçon, puis un répons, l’ambrosien, le verset, le cantique tiré des « Évangiles », la litanie, et avec l’Oraison dominicale ce sera le renvoi.

Sans réticence, il a ainsi adopté la coutume liturgique qui nous donne chaque soir la mission de chanter le cantique de la Bienheureuse Vierge Marie. Sans réticence, et même avec joie, car il a reconnu chez la Mère de son Sauveur toutes les vertus qu’il désire pour ses fils. Il voit dans leur consécration une virginité du cœur retrouvée. En tête des vertus de Notre Dame, il y a la foi, l’espérance et la charité. Et plus spécifiquement, il y a son obéissance, son silence et son humilité. Saint Louis Marie Grignon de Montfort veut que nous méditions aussi la pureté1. Il y a aussi la filialité et la charité fraternelle. L’Esprit Saint a dit à Marie :

Reproduisez-vous […] dans mes élus : que je voie en eux avec complaisance les racines de votre foi invincible, de votre humilité profonde, de votre mortification universelle, de votre oraison sublime, de votre charité ardente, de votre espérance ferme et de toutes vos vertus2.

Poursuivons encore notre contemplation de l’âme de notre Mère, qui nous apprend le tempérament monastique. Dans le jardin secret de l’âme de Marie,

Il y a dans ce lieu des prairies vertes d’espérance, des tours imprenables de force, des maisons charmantes de confiance, […] un air pur, sans infection, de pureté ; un beau jour, sans nuit, de l’humanité sainte ; un beau soleil, sans ombre, de la Divinité ; une fournaise ardente et continuelle de charité, où tout le fer qui [y] est mis est embrasé et changé en or ; il y a un fleuve d’humilité qui sourd de la terre et qui, se divisant en quatre branches, arrose tout ce lieu enchanté ; ce sont les quatre vertus cardinales3.

Contempler et se revêtir des vertus de Marie, ce n’est pas une douce rêverie sans consistance. Elle est la même hier, aujourd’hui et à jamais, et la regarder, c’est nous réformer, c’est marcher avec elle sur le chemin direct et lumineux, bordé de flambeaux, vers la porte du Ciel. La regarder, c’est décevoir le malin qui aimerait tant nous distraire avec toutes les mauvaises nouvelles qu’il accumule avec fracas. Regarder Marie, c’est prier pour la restauration de la Paix, pour l’extension de l’Église, pour le progrès de tous vers Dieu.

À l’exemple de Notre Bienheureux Père saint Benoît, laissons-nous donc envahir par la présence de la Vierge Marie.

Amen.

1Cf. Saint Louis Marie Grignon de Montfort, Traité de la vraie dévotion, no 260.

2Saint Louis Marie Grignon de Montfort, Traité de la vraie dévotion, no 34.

3Saint Louis Marie Grignon de Montfort, Traité de la vraie dévotion, no 261.